1- Arrivée de Vespa Velutina en Aquitaine.
C’est pendant l’été 2006 que Jean Haxaire, entomologiste renommé, annonçait dans un article du journal Sud-Ouest, le présence en Aquitaine d’un frelon d’origine asiatique, découvert en 2004 en Lot-et-Garonne , du nom de Vespa Velutina Nigrithorax.La direction des services vétérinaires de la Dordogne, signalait, quelques jours après, l’arrivée de cet hyménoptère dans le département.
Depuis, bien installé chez nous, ce frelon ne cesse de coloniser le territoire et de se multiplier.
2- Campagne de piégeage.
Une campagne de piégeage initiée par la Préfecture de la Dordogne et soutenue par le Conseil Général et l’Union des Maires a été mise en place au printemps 2008. Elle a permis le prélèvement de nombreuses fondatrices.
La première, pour nous, a été piégée à Ribérac, chez un habitant de Toutifaut, le 22 Février, soit une semaine après le début du processus de piégeage.
Les prises futures ont été liées aux conditions atmosphériques: positives les jours de beau temps, négatives les autres jours.
Dès le 1er Mai, les fondatrices de notre frelon (européen) Vespa Crabro ont été plus nombreuses dans les pièges que les fondatrices Velutina, aussi avons-nous cessé la pose de pièges vers le 15 Mai.
Pour ceux d’entre nous qui avons poursuivi le piégeage, ce dernier s’est soldé par des prises insignifiantes de Velutina en Juin; 1V.V. pour 19 V.C., 3 V.V. pour 40 V.C…. Nos résultats ont été transmis au CNRS.
3- Les différents types de pièges.
Au début du piégeage, nous avons utilisé le piège sélectif de Jacques Blot (piège 1). Très vite, ce piège s’est révélé inefficace. Les effluves libérés par les appâts s’échappaient par les trous latéraux du manchon en plastique et non par l’embout de l’entonnoir.
De plus, les mouches prisonnières n’ont pas pu sortir par les ouvertures latérales prévues à cet effet, les insectes pris essayant de s’échapper vers le haut du piège.
Les apiculteurs et les référents ont alors réfléchi à d’autres pièges plus efficaces, sans ouvertures latérales, sans bouchon à l’extrémité de l’entonnoir, varié les types de pièges et les appâts utilisés, et les frelons V.V. sont entrés.
La campagne de piégeage 2009 s’est mise en place.
Le piège de Jacques Blot a été modifié (schéma ci-contre)
Il aurait dû bien fonctionner. Le piégeage devait débuter vers le 15 Février et se terminer au moment de la sortie d’hibernation des femelles Vespa Crabro.
La prédation de Vespa Velutina sur nos colonies d’abeilles est indéniable. Chacun de nous s’est investi dans la lutte contre cet envahisseur en piégeant, en signalant et /ou en détruisant les nids dès que ces derniers ont été découverts.
4- Réaction constatée des abeilles.
A l’automne 2007, notre rucher-école était infesté par cet indésirable: une dizaine de frelons autour de chaque ruche dans un bourdonnement lourd semblable à celui de Vespa Crabro. Une trentaine d’abeilles regroupées à droite de chaque planche d’envol libéraient le passage à gauche pour leurs congénères. Les frelons, dans un va-et-vient continu, repartaient avec une abeille qu’ils décorticaient et consommaient sur place ou disparaissaient dans trois directions différentes sans que nous puissions localiser les nids.
Dans le même temps, nous observions que nos abeilles essayaient de se protéger du prédateur. Ainsi, un essaim installé dans un fût, depuis plusieurs années et devenu une colonie prospère organisait sa protection.
En 2007 comme en 2008, les abeilles ont colmaté le trou de la bonde, ne laissant qu un étroit passage protégé de l’intérieur par les gardiennes.
5- Mesures prises pour la protection des abeilles.
Devant cette situation inquiétante, nous avons nourri et nourri nos colonies, d’abord avec du sirop, ensuite avec du Candi et ce jusqu à la visite de printemps. Ce jour-là, nous avons eu l’agréable surprise de retrouver toutes nos colonies vivantes et en bon état. Un seul essaim était orphelin. A l’automne 2008, l’infestation du rucher-école était comparable à celle de 2007.
Lors de la mise en hivernage, nous avons placé des réducteurs d’entrée en plastique pour les ruches équipées de plateau Nicoplast, retourné les portières métalliques et réduit l’entrée à 5,5 mm de hauteur pour les autres. Plus d’abeilles sur les planches d’envol en attente.
Nous avons « truffé » le rucher de pièges bouteilles et d’un piège grand format élaboré par l’un des nôtres.
Les jours où les abeilles ne sortaient pas, les frelons tournaient autour des ruches et finissaient par entrer dans les pièges. Chaque fois que nous avons renouvelé les appâts, nous avons fait de belles collectes.
6- Implication des scientifiques.
Notre vigilance est nécessaire mais elle est insuffisante. Aussi le Rucher du Périgord a-t-il décidé d’apporter son concours aux scientifiques chargés du projet d’études de Vespa Velutina en Aquitaine.
Le 25 Juin 2008, deux chercheurs du C.N.R.S. de Gif sur Yvette Agnès Rortais et Gérard Arnold sont venus choisir les ruchers que nous mettions à leur disposition pour effectuer leurs travaux. 3 ruchers ont été retenus dans le département dont un sécurisé pour l’installation de caméras et de matériel informatique.
Ces ruchers répondaient aux critères définis par les chercheurs eux-mêmes.
A sa demande, nous avons mis à la disposition du chercheur du Muséum d Histoire Naturelle les ruches dont elle avait besoin pour ses travaux dans le Sarladais.
Le 11 Septembre 2008, caméras et matériel informatique ont été déplacés vers le site de l’INRA, à Villenave d’Ornon où Vespa Velutina pullulait.
En 2008, 2009 et 2010, les scientifiques du CNRS sont venus travailler dans les ruchers expérimentaux mis à leur disposition. Nous avons été régulièrement informés des résultats de leurs travaux.
Lors de nos assemblées générales, nous avons accueilli ces scientifiques: Denis Thiery de l’INRA de Bordeaux, en 2009, présenté les travaux de Nevile Maher, en 2010, reçu Mariangela Arca du CNRS, en 2011, Quentin Rome du MNHN, en 2012, Eric Darouzet de l’Université de Tours, en 2013.
A ce jour, tous les scientifiques chargés de l’étude du frelon asiatique, s’accordent à dire que le piégeage de printemps est inefficace et n’induit pas la diminution des nids dans les secteurs piégés, il est dommageable pour la biodiversité.
Réservons nos collectes à ceux qui sont en mesure de vérifier s’il s’agit de femelles fécondées ou non afin d’avancer peut-être vers de nouvelles stratégies.